Melville contre Joseph Hansen
Hier matin, je me suis
retrouvé devant un petit problème : il ne me restait que deux livres à
lire, "Moby Dick" de Melville et "Un pays de vieux" de Joseph Hansen.
Ma petite bibliothèque de romans de poche est en pleine construction,
j'achète les livre par demi-douzaine régulièrement mais je ne trouve
pas le bon meuble pour les ranger alors je fais des piles (qui sont
hélas de plus en plus hautes), bref, ce n'est pas le sujet. Je suis un
rythme de lecture bien particulier, j'alterne romans noirs ou policiers
avec les grands classiques. Comme je venais de finir "A fleur de peau"
de Joseph Hansen (encore lui), je devais commencer "Moby Dick", mais
c'était vendredi ! Je partis donc avec "Un pays de vieux" dans ma
sacoche, me disant que si le bouquin me plaisait je l'aurai fini avant
lundi et pourrais alors m'atteler à "Moby Dick".
Pour celles et ceux
qui ne connaissent pas Joseph Hansen (je ne le ferais pas pour
Melville), c'est un auteur américain, né en 1923 dans le Dakota du Sud,
et les romans que j'ai lu de lui mettent en avant Dave Brandsetter. Ce
n'est pas un policier, ni un détective privé, mais un détective pour
une assurance vie (ou décès), car son rôle est de vérifier si une mort
accidentelle (suspecte donc pour une assurance) n'est pas un meurtre
maquillé par le bénéficiaire pour obtenir plus rapidement l'argent de
l'assurance. Dave Brandsetter a du flair, et les morts sur lesquelles
il enquête, sont souvent des meurtres (heureusement sinon il n'y aurait
sans doute pas matière à un roman ; à faire une fois, pour surprendre
les lecteurs : 300 pages pour réaliser que oui, c'est bien accident
!!!). Mais il se trompe beaucoup : ce sont des meurtres, oui, mais le
coupable n'est pas toujours celui que l'on croit et pour Dave
Brandstetter, il ne trouve le coupable qu'à la fin du roman (ou pas).
Dans les romans noirs, le héros, flic ou privé, est souvent un "Shaft"
en puissance (sans doute à cause des fantasmes de l'auteur, car leur
description n'en fait pas des prix de beauté), ici, Dave Brandstetter
est fidèle à son amoureux. Hé oui, il est homosexuel, chose aussi rare
dans cette littérature qu'un héro fidèle. J'hésitais à vous le dire car
ce n'est qu'un détail, mais on dit de Joseph Hansen qu'il a banalisé
l'homosexualité dans la littérature populaire, alors finalement, ça a
son importance. Voilà pour la parenthèse.
Revenons à l'histoire. Je
m'installe dans le bon métro à Chatillon-Montrouge (chose qui n'est pas
toujours évidente, car les conducteurs de la ligne 13 n'annoncent le
terminus du train qu'à son départ ou parfois après ; et quand on doit
aller à Garibaldi, il faut prendre les métros à destination de
Saint-Denis Université), ouvre ma sacoche, tire d'une poche mon roman
et commence à lire en attendant le départ. Stupeur ! Dans "A fleur de
peau", j'ai quitté Dave Brandstetter quadra et là, je le retrouve à 70
ans. Je retourne le roman et lis toute la quatrième de couverture :
"Joseph Hansen met un terme définitf aux aventures de son détective
homosexuel". Horreur, c'est le dernier de la série. J'avais déjà lu
tous les romans de Georges Pélécanos (sauf "Drama City" qui vient de
sortir) du dernier au premier, je n'allais pas recommencer avec Joseph
Hansen ! La mort dans l'âme, je me décidais et rangeais le roman dans
ma sacoche.
Je passais le reste du trajet, à écouter distraitement
la conversation des trois étudiantes assises autour de moi sans
parvenir (misère !) à deviner le sujet de leurs études et pourtant
elles en parlaient. Ce week-end, j'ai à faire l'analyse du tome 3 de la
série "Black Op" de Desberg et de Labiano et lundi, j'attaque "Moby
Dick". J'espère juste une chose, c'est que Melville a adapté la
longueur de ses chapitres aux trajets en métro :-).